Séjour Aravis du 19 au 26 juillet

Novembre 2023 Reportages

La vingtaine de participants arrive progressivement au camping du Crêt de St Jean de Sixt, du coté de La Clusaz et du Grand Bornand, où nous attendent déjà Anne-Marie, l’intendante et Franck, notre accompagnateur, qui est presque chez lui, car il vient du massif des Bauges, tout proche.

Il y a un soleil timide pour accueillir tout le monde et un petit vent frais pendant le tour de présentation/apéro/bières et le briefing d’activités pour la semaine à venir… qui s’annonce humide…

Nos passagers, Hugo 18 ans et Romain 20 ans, sont avec leur maman Nathalie et Florence, c’est leur premier séjour, alors que Marie-Laure et Émilie sont des habituées, Lénaïk va marcher avec une aide car le périple s’annonce escarpé, et les conditions atmosphériques vont corser la performance…

Après le dîner (quiches, salade, melon), le bivouac s’organise autour des marabouts et des tentes individuelles. Le ciel, étoilé et peu nuageux, autorise même quelques dormeurs sans abri à admirer la voûte céleste… Ce plaisir sera de courte durée, dès le lendemain matin une pluie tenace et intermittente va rythmer nos déambulations….

Tombe, tombe la pluie, mon chapeau se mouille, mes souliers aussi

J 2 - La journée d’initiation va nous mener de l’autre côté de la vallée par des chemins de terre boueux et inondés, des alpages humides, pendant 4 heures et 250 m de dénivelé, sous une pluie fine qui mouille plis et replis de nos épaisseurs…

Quelques randonneurs amateurs de boue ou d’escargots ou de champignons nous croisent dans les sous-bois. C’est l’occasion de démarrer le « sourire chamina » : toute photo avec le sourire banane rapporte à l’association 0.20 euros, à concurrence de 5000 portraits de randonneurs en situation… Chacun des participants va ainsi parler d’HCE et de ce partenariat.

La promenade continue, nos silhouettes font un peu gorilles dans la brume alors que l’on aperçoit au dessus des nuages bas les somptueuses crêtes qui nous attendent…

De retour au camp, chacun a déjà trouvé son créneau d’activité, au montage du marabout, dans l’équipe vaisselle, aide au miam-miam /coucher, en cuisine-pluches-couvert, mécanique joëlette, nursing du mulet, le tout interchangeable et polyvalent selon les besoins et l’actualité, pas de “glandos” les mains dans les poches… !!!

Quand on tombe dans l’eau, la pluie ne fait pas peur (proverbe russe )

Il faut ensuite, démonter les joëlettes et préparer les sacs et intendance pour le lendemain car il est prévu un bivouac au chalets de Leissy… alors qu’un orage s’abat sur le camping et l’équipe cuisine travaille dans la boue car une flaque s’installe et s’étend sous nos pieds... la table du dîner, les chambres en toile sous le marabout, les tentes individuelles sont mises à l’épreuve… les places sèches deviennent rares…

La gadoue, la gadoue…

J 3 - Lever humide, mais de bonne humeur car il faut démonter le camp, charger passagers, mulet, joëlettes pour un transfert de quelques kilomètres.. en camion et véhicules privés et ça chante dans les rangs...
« ah ce qu’on est serré, au fond de cette boîte, chantent les sardines, entre l’huile et les aromates.. ». Vers Entremont le Haut ( 950 m ) d’où nous partirons par de longues routes forestières défoncées, déjeuner au chalet de Mayse, hébergement au sec bienvenu dans une « ferme-bar-gîte » avant de reprendre la montée dans les alpages pentus, sous la bruine le vent et la brume vers le col de la Forclaz (1844 m ) et redescendre coucher près du lac de Leissy… Que l’on verra très peu, entre les nuages et les bourrasques...

Journée rude car il y a eu 900 m de montée sur des cailloux, entre les vaches et les bouses….

Il pleut, il pleut bergère…

Sagement, Franck nous dispense d’un bivouac en plein air compte tenu de l’ambiance climatique de Novembre dont nous bénéficions depuis ce matin, et le gîte de Leissy, tout neuf, va nous abriter dans de spacieux dortoirs de bois blanc où nos affaires pourront sécher et s’égoutter au coin du poêle de la salle commune… Ce n’était pas prévu, mais puisque nous y sommes, autant l’utiliser plutôt que de camper en « hivernale ».

Marie-Anne est heureuse de cuisiner au sec, alors que dehors, toute la nuit le vent et la pluie froide tourbillonnent sans cesse, la cabane WC est dehors au fond du jardin, et aider nos amis handi pour des besoins naturels relève d’une expédition polaire !!

Mais qui donc nous a parlé des WC comme lieux d’aisance où il faut se détendre pour opérer en toute sérénité et efficacité ? Et il n’y a pas de salle d’attente…, débat difficile entre l’envie pressante et le confort interne… !!!

Ma petite est comme l’eau, elle est comme l’eau vive…

J 4 - Le lendemain est comme la veille, maussade et pluvieux… Camille et Mathieu, stagiaires accompagnateurs nous ont rejoint par l’autre côté, depuis les chalets de Cuillery où nous devions aller aujourd’hui, et informent Franck de l’état du sentier, glissant et risqué pour les joëlettes et le mulet… Sagement nous allons redescendre par notre itinéraire de la veille, sous la pluie bien sûr… mais le retour au camp du Crêt se fera avec un timide soleil et l’on remontera les marabouts et tentes dans de bonnes conditions tandis que tous les fils et grillages du camping se couvrent de ponchos, capes, t-shirts et pulls multicolores…

Enfin on peut voir les sommets ensoleillés, la verdure des alpages et le blanc des barres rocheuses, un grand vent sèche les bâches, balaie les nuages gris, lourds ou blancs, la gérante du camping vient nous remonter le moral, et on remonte le sien, car le temps fait fuir ses campeurs… heureusement il y a le sourire Chamina…

Il pleut sur Nantes, donne moi la main, j’ai le cœur chagrin…

J 5 - On redémonte le camp et on refait un convoi vers Chinaillon pour rejoindre les Bouts et Maroly, puis la clé des Annes par le GRP tour des Aravis, c’est le circuit prévu après cet intermède aquatique… Et ça se passe plutôt bien, avec un chaud soleil qui tape dur sur nos peaux délavées.. le pique-nique de midi est suivi d’une heure de repos-bronzage… avant de redescendre tranquille vers le col des Annes ( alt 1721 m ), où l’on va monter les marabouts en plein champ (gare aux bouses !), près de la ferme et de la fromagerie, avec une superbe vue sur la vallée du Grand Bornand et la chaîne des sommets entourant la Pointe Percée, étape de demain.

Après un apéro -bière-jambon sec-saucisson-chips, dîner opulent avec un risotto gargantuesque (Marie-Anne sait que le moral des troupes est au fond de la gamelle..). Le ciel venteux et changeant ne menace pas trop pour le moment. Les cloches des vaches revenant de la traite animent la soirée, demain matin ce sera à partir de 6 heures..

Singing in the rain, singing in the rain…

On se couche à peu près confiants, mais vers onze heures du soir, pluie fine croissante et insistante, grondements au loin, éclairs, et à 1 heure du matin, puis rebelote à 3 heures, un déluge martelant les toiles éparses déclenche... une sortie en urgence pour fermer les ouvertures du marabout (merci Nathalie ! ). Un regroupement stratégique des dormeurs hors des gouttières, un mouvement de repli sous la table et sa toile cirée…

J 6 - Le matin nous trouve à peu près en état de marche, on n’est pas en sucre, on ne va pas fondre... !!! Dès 6h 30 le petit déjeuner est prêt, et la mise en route à partir de 9h30 pour le col de Borne ronde et le Planet se fait sans grincement de rouille avant de grimper au refuge de Gramusset (2136 m d’alt).

Le temps est venteux et sec, les sentiers humides et boueux de la veille, les passages de prairie humides révèlent les athlètes du maniement des joëlettes, et heureusement que la roche est sèche car de nombreux passages de « lapias » sont assez techniques…

En avant du groupe, Monique guidant Lénaik ; fermant la marche, Marc avec Florence devant Mainon le mulet courageux et méritant ; et au milieu les Joëlettes avec des équipages tournants, les deux Christian, Isabelle, Cécile, Guillaume, Patricia, Nathalie, Virginie, Anne, Denis, Nicolas, Michel, aidés de Luc et Maud, et bien sûr Franck qui est satisfait de son équipe de branquignols. Tous ont bien franchi les écueils de ces roches fissurées avec des marches obliques et inégales, la végétation se faisant rare avec la progression jusqu’au refuge rénové…

L’arrivée vers 16 heures se fait juste avant une brève averse froide, mais vite le groupe prend possession des couchettes superposées et d’une salle commune où jouent déjà enfants et randonneurs d’un groupe précédent…

Il pleut, il fait soleil, c’est la fête à Marseille

La fin de l’après midi est sereine, et l’on prend plaisir à admirer le paysage sous une merveilleuse lumière alors que certains ont encore des fourmis dans les jambes pour aller voir plus haut sur le sentier menant à la Pointe Percée, courant sur les rochers chauffés par le soleil couchant.

Le dîner est pris au refuge, soupe épaisse de légumes, bœuf bouilli avec sauce au vin et myrtilles, poivrons, carottes, fromage et tiramisu, notre intendante est de repos, bien mérité, mais demain matin nous prendrons le petit déjeuner en autonomie…

Il commence à faire frais : 14 °, demain matin ce sera 6°, et avant de monter se coucher, en dortoirs collectifs sous les combles, certains attendront le coucher de soleil au milieu des nuages rougeoyants, bravant le vent frais et la brume montante… et vers 22 heures, la pluie revient, drue et tenace jusqu’au matin…

Toute la pluie tombe sur moi …

J 7 - Le lever des couchettes au ras du toit et des poutres, à la lampe frontale et la descente par échelle à poules vers la table du petit déjeuner est un épisode acrobatique d’autant plus sympathique qu’il se déroule au sec… !!!

Même si les toilettes sont écolos (sciure et plein air) et abritées à trente mètres, il faut y aller en joëlette car il y a des marches et des virages... ultime mise en jambes avant une belle descente par le chemin escarpé gravi la veille, vers le Planet et le GR tour des Aravis et pause ensoleillée aux chalets de la Bombardellaz pour le déjeuner près de l’abreuvoir à vaches. Ces Dames fournissent le lait nécessaire a l’élaboration du Reblochon fermier et de la Tome qui font nos délices depuis une semaine.

Ce dernier trajet par des sentiers détrempés à flanc de coteau avant de rejoindre les routes forestières traversées par de grosses racines entre les rochers émergents nous ramène au dessus de La Clusaz…

Le jour où la pluie viendra, nous serons, toi et moi, les plus riches du monde…

On rejoint alors le grand beau temps, la civilisation des bipèdes et des moteurs, les cafés bar avec parasols en terrasse au milieu des alpages, et notre cortège ne manque pas d’étonner les familles proprettes et les promeneurs bedonnants avec de petits toutous en laisse…

Nos équipages mono-roues, suivis du mulet et ses sacoches rebondies surprennent le regard des vacanciers de cette station huppée, et encore plus lorsque l’on s’arrête près du parking, en face du golf…

Le bouquet final fut offert par Mainon qui, pour se détendre, se roule avec délectation sur le superbe gazon anglais, avant de brouter avec gourmandise cette herbe verte, repas différent des graminées d’altitude qu’il regrettait sans doute déjà.

Après réunion des troupes et embarquement dans les véhicules, dernier trajet vers le camping du Crêt et ultime montage des marabouts sous un soleil radieux et presque moqueur.

Le dernier dîner en extérieur avec les lampes à gaz avait été précédé d’un apéro offert par les deux mamans, Nathalie et Florence, émues et ravies de leur semaine HCE.

Le « débriefing » fut bref et positif, Franck satisfait de ses troupes, les troupes contentes de lui et plébiscitant l’intendance, Marie-Anne et sa fille Virginie, brillantes et efficaces comme on peut l’être dans une famille nombreuse, les jeunes et moins jeunes ont pu s’exprimer par leurs actes et faire profiter les autres de leurs qualités, qu’elles fussent athlétiques, d’expérience, de sagesse ou d’organisation.

Le dîner fut animé, avec un super couscous, fromages locaux, crème fraîche, crème de marron et confitures diverses, avant d’aller vite se coucher vers 23 heures sous une rituelle et désormais quotidienne pluie fine qui allait s’accentuer pendant la nuit.

La vie, ce n’est pas d’attendre que l’orage passe, c’est danser sous la pluie. ( Sénèque)

J 8 - Dernier jour lever précoce et petit déjeuner enjoué sans nostalgie, alors qu’il faut plier les tentes mouillées sous la pluie et préparer les sacs du départ… Adieux échelonnés car il y a des trains à prendre et des transferts à assurer. Certains vont se revoir bientôt sur d’autres séjours, d’autres se donnent rendez-vous à l’AG de novembre, avec les yeux brillants de joie ou de larmes contenues…

On aura monté et démonté cinq fois le marabout, survécu à sept jours de pluie, bénéficié de trois demi-journées de soleil, apprécié et harmonieusement cohabité avec deux belges seulement trahis par leur bières conviviales et leur accent inimitable, obéi scrupuleusement aux douces injonctions de Franck, maîtrisant les éléments minéraux et aquatiques, marché trente heures, gravi près de 2500 m de dénivelé cumulé, accepté et contrôlé les foucades de Mainon qui se civilise de plus en plus, bref on est des Hcéens à part entière… et de grands gamins de plein air...

Tombe tombe tombe la pluie
Tout le monde est à l’abri,
Y-a-que mon p’tit frère
Qu’est sous la gouttière
Qui pêche du poisson
Pour toute la maison

Texte Marc Gallavardin - Photos Nathalie Stourm